Gods of love - Peut-il vraiment réparer tous les coeurs brisés ? de Eugenie Dielens chez Hugo

Éros et l'amour, c'est une histoire qui dure. Cela fait des millénaires qu'il l'insuffle aux âmes meurtries et leur redonne goût à la vie, laissant des esprits soulagés dans son sillage. Il est fait pour ça, il est né pour ça. Ironiquement, ce sentiment lui est pourtant interdit. Alors à force d'assister aux histoires des autres, c'est presque par nécessité qu'il vole au secours des cas les plus désespérés, pour leur apporter ce que lui ne pourra jamais vivre.

Lorsqu'il rencontre Kaléa, il sent qu'il pourra lui procurer l'aide dont elle a besoin: le cœur brisé, la jeune femme refuse farouchement de se laisser bercer par ses beaux mots et sa voix envoûtante. La faire de nouveau aimer devient un défi personnel qu'Éros est prêt à relever. Peu importe le prix.

Mais si, avant de vouloir guérir le cœur des autres, Éros devait avant tout apaiser le sien ?

 Auteur: Eugenie Dielens

Editeur: Hugo Poche

Parution: 10 novembre 2021



Parfois, les romans arrivent entre nos mains à la suite d'une pulsion. C'est le cas pour "Gods of love". Je vous explique. Je suis dans la file d'attente de Magali Inguimbert, au festival New Romance 2021 (à Reims), pour faire dédicacer mon roman. Derrière moi, deux jeunes femmes parlent d'Eugenie Dielens. Elles sont heureuses que l'auteure est du monde à son stand de dédicaces. Au vue de leur enthousiasme, je me retourne pour regarder le stand, puis vers elles. Je leur demande si le roman est bien. Ce qu'elles en pensent. Elles m'expliquent, avec franchise, qu'elles ne l'ont pas encore lu mais qu'elles l'ont acheter ce matin à la librairie (de folie) du festival. Elles me tendent le livre pour que je puisse lire le résumé, et là, je craque. 

Ma dédicace avec Magali Inguimbert (qui est adorable 💜) terminée, je fonce (une nouvelle fois) à la librairie pour me procurer "Gods of love". Je n'aurai malheureusement pas le temps de me le faire dédicacer mais ce n'est que partie remise! 

Bref, à la base ce roman n'était pas du tout sur ma whislist "achat impératif au festival New Romance" et pourtant je suis repartie avec. J'adorai sa couverture, non pas pour le torse... vilaines lectrices! mais pour l'effet général qu'elle procure, l'explosion du cocon. Toutefois, je n'avais pas prit le temps de lire le résumé et de vraiment me pencher dessus. Il aura fallut deux jeunes femmes à l'enthousiasme communicatif pour qu'il termine sur mes étagères. La vie de lectrice nous réserve bien des surprises! 


"Gods of love" est l'histoire d'un dieu qui ne devait pas tomber amoureux alors qu'il représente/distribue l'Amour et d'une jeune femme "trahie" par la vie qui ne souhaite plus s'attacher. Deux fêlures bien différentes mais qui vont se faire écho. 

J'ai vraiment aimé la manière dont Eugenie Dielens a introduit ses protagonistes, leur histoire et la romance dans son roman: tout en douceur... L'auteure prend le temps de nous décrire les personnages, qui ils sont, comment ils réfléchissent, leur passé. C'est vraiment agréable car petit à petit on se sent plus proche d'eux. Une véritable empathie se crée. Leurs douleurs, leurs doutes et leurs bonheurs  vibrent en nous. Tout cela se fait naturellement. Comme si notre rencontre avec eux était une évidence.

Les personnages secondaires ne sont pas en reste car ils tiennent une place importante dans l'histoire. C'est vraiment plaisant que l'auteure leur ait donné une belle place dans son roman. Ils sont un véritable plus. 

Kaléa est une jeune femme forte mais elle est pétrie de peurs. Et on le comprend aisément en découvrant son histoire. Toutefois, malgré ses angoisses et les difficultés qu'elle rencontre et a rencontré, elle avance. Un pas après l'autre. Elle se fait violence pour retrouver une vie sereine. Mais a quel prix? Celui de la solitude. Kaléa ne veut plus créer de lien avec les autres. Elle a peur de souffrir à nouveau, de faire fuir et de se retrouver en miettes. Ce personnage est tout particulièrement touchant car il parle des terribles conséquences d'une vie qui bascule. La perte de ses amis, sa famille, de son conjoint, la pitié dans les regards, le combat quotidien pour réussir à refaire ce que l'on faisait avant de "presque" tout perdre. Eugenie Dielens nous donne à lire une jeune femme courageuse, qui parfois perd pied, mais continue malgré tout à se battre. 

Éros a le cerveau rempli de questions. Et on le comprend. Alors que l'on attend de lui qu'il suive les règles, ce qu'il fait depuis des millénaires, il "commence" à se questionner sur le bien fondé de sa mission. Être un dieu de l'Amour quand on ne connait pas l'Amour, c'est étrange quand même... Il se demande si il peut aimer. Ce que cela fait d'aimer. Notre dieu est perdu. C'est beau à voir car il remet tout en question, change de point de vue pour voir les choses sous un autre angle, verbalise ses doutes, ... 

La romance est simple mais efficace. Ce qui la sublime? Les enjeux qui sont derrières. Car sous les aspects d'une histoire d'amour "banale" se joue de nombreuses choses. Eugenie Dielens nous donne à réfléchir sur un certain nombre de sujets qui nous parlent à tous. 

Le premier que je citerai est la famille. Ici elle est abordée sous deux aspects. La fraternité et la parentalité. 

La fraternité via les Erotes. Il y a un vrai lien entre les frères. Plus ou moins fort mais bien présent. On les voit évoluer les uns avec les autres, les uns pour les autres. Il y a une véritable bienveillance dans leurs réactions. Et même si parfois ils ne sont pas d'accord, ils respectent le choix des autres tout en exprimant leur avis. C'est une histoire d'équilibre. J'ai aimé découvrir une telle fraternité. J'ai un grand frère et je dois avouer que nous avons ce genre de relation. Ici, l'auteure nous offre une vision positive des relations fraternelles, tout en nous montrant bien que cela n'empêche pas les violents désaccords. 

Eugenie Dielens nous parle ensuite de la mère. On voit peu Aphrodite dans le roman, toutefois, elle y joue un rôle essentiel. Ici, elle n'est pas que la déesse de la beauté, de l'Amour ou de la séduction, elle est aussi une représentation de la Mère. Elle est compréhensive, encourageante même si elle a peur, ouverte au dialogue et souhaite faire passer le bonheur de ses enfants avant tout. C'est une représentation idyllique mais inspirante. Être mère est un défi au quotidien. On n'est pas parfaite. On est humaine. On a l'impression d'être dans l'erreur car il n'existe pas de guide universel pour "bien" élever son enfant. Lire les superbes passages avec Aphrodite font du bien car ils nous rappelle que nous avons le droit d'avoir peur et quelles femmes formidables nous sommes si nous ne faisons "que" faire passer le bonheur de nos enfants avant tout.

C'est maintenant que je vais mettre un petit bémol à mon enthousiasme. Eugenie Dielens nous livre des réflexions positives et idylliques des relations familiales. Ce qui est bien. Toutefois, il existe ici un réel décalage avec ce que peut être la réalité. Mon travail biaise surement ma vision des choses (je suis Assistante Sociale) car je rencontre beaucoup de famille où le lien mère/enfant n'a pas été fait, où la cellule familiale est "déconnante". Mais vous savez quoi, au final, cette fraicheur m'a fait du bien. Ce n'est pas parce que le monde est gris qu'il ne faut que des livres gris. Merci Eugenie Dielens!

Un des autres thèmes abordés dans "Gods of love" est l'Amour, mais surtout jusqu'où sommes nous capable d'aller pour l'être aimé. Beaucoup vous diront directement: "je suis capable de tout". Mais en y réfléchissant bien est ce vraiment le cas ? Ici Éros doit faire un choix cornélien. On pourrait le résumé à un choix égoïste VS un choix pour l'autre. Mais les choses sont biens plus complexes car quelque soit la décision d’Éros, elle aura des conséquences pour lui mais aussi pour son entourage. Et le vrai dilemme se trouve là. Peut-on "embarquer" d'autres personnes dans ses choix ? J'ai vraiment aimé la manière dont Eugenie Dielens a amené le sujet et les moments de réflexion d’Éros. Bien que cela ralentisse le rythme du roman, ils sont pour moi essentiels car ils livrent avec franchise la torture mentale que vit le personnage. Et ce que je trouve dingue, c'est que l'on vibre au fil des réflexions. On comprend les dilemmes d’Éros. Et au final, même si on sait quelle fin on souhaite, on se demande quelle solution nous aurions prise. Personnellement, ce roman m'a beaucoup fait réfléchir sur moi même et ma vision du couple, de l'Amour. Car au fil des ans, parfois, on perd un peu de la magie et de la fougue que l'on a au début de notre vie à deux. Et LIFE SPOILER: il ne faut surtout pas! 

Eugenie Dielens est une auteure courageuse. La mythologie est un sujet complexe, comprenant de nombreux personnages aux noms différents suivant les cultures. Il est facile de s'attirer les foudres (jeu de mots, Zeus etc... non??? bah je le trouvais bien moi) des passionnés de culture mythologique. De plus, tout ceci étant basé sur des mythes, rien n'est vraiment gravé dans le marbre (nouveau jeu de mots, marbre/statues/antiquité/dieux... non??? toujours pas?). On devrait donc pouvoir facilement prendre des libertés. Mais... Ce n'est pas réellement le cas. Regardez par exemple les lynchages puérils autour des mythes vampiriques... Bref, c'est donc courageux de baser son univers sur la mythologie. Ça l'est encore plus de dénoncer les représentations "universelles". C'est avec humour qu'Eugenie Dielens fait sourire Éros devant la représentation de ces frères et lui-même. L'auteure nous montre que les mythes peuvent être ce que l'on souhaite tout en gardant le cœur de ce qu'ils sont. 

Je terminerais ma chronique en vous parlant de la plume d'Eugenie Dielens. Fluide et agréable, l'auteure nous emmène dans son monde avec douceur. D'ailleurs je pense que le mot qui résume le mieux ce roman est DOUCEUR. "Gods of love" est un roman qui irradie la bienveillance, qui donne de l'espoir et envie de se battre pour de belles causes. Voici un roman que je vous recommande, si vous avez besoin d'une petite bulle d'air frais dans votre quotidien.